Agir comme corps universel avec une mission universelle [41]

  1. Dans le Principe et Fondement des Exercices Spirituels, Ignace a écrit que toutes les choses sont créées pour un unique objectif : une plus grande gloire de Dieu et le salut de l’âme (ExSp n° 23). Tout le reste est second et, par conséquent, contingent. Les choses créées doivent être utilisées dans la mesure où elles sont une aide pour atteindre la fin poursuivie, et doivent être écartées dans la mesure où elles sont un obstacle pour atteindre cette fin. Il en résulte une liberté spirituelle qu’Ignace appelle un sain détachement, qui permet de prendre des décisions en vue de la fin ultime. Cette perspective téléologique fournit une logique pour chercher les nouveaux signes des temps et accueillir les changements comme quelque chose à discerner et à adopter, non à craindre.
  2. Il peut être difficile de s’adapter au défi du changement, mais devant l’étendue des changements dans la culture, l’éducation, la religion, le catholicisme, et la Compagnie de Jésus au cours des trente dernières années, nous n’avons pas d’autre choix. Il y a toujours la tentation de s’appuyer sur un passé qui a fait ses preuves. Les écoles jésuites doivent dépasser ce qui était considéré comme étant le mieux dans le passé, comme certains le prétendent. Elles ne sont pas des musées dans lesquels un charisme vivant est devenu fossilisé. Dans une homélie donnée lors de la célébration eucharistique qui concluait l’année de la vie consacrée, le pape François s’est adressé aux membres d’ordres religieux, mais ses propos s’appliquent à tous, Jésuites et laïcs, qui sont membres de notre apostolat éducatif :
  3. « Nous sommes les gardiens de [l’]étonnement. Un étonnement qui demande à être toujours renouvelé ; faites attention aux habitudes dans la vie spirituelle ; attention à cristalliser nos charismes en une doctrine abstraite : les charismes des fondateurs — comme je l’ai dit d’autres fois — ne sont pas à sceller dans des bouteilles, ne sont pas des pièces de musée. Nos fondateurs ont été animés par l’Esprit et n’ont pas eu peur de se salir les mains dans la vie quotidienne, avec les problèmes des personnes, en parcourant avec courage les périphéries géographiques et existentielles. Ils ne se sont pas arrêtés devant les obstacles et les incompréhensions des autres, car ils ont conservé dans leur cœur l’étonnement de la rencontre avec le Christ. Ils n’ont pas apprivoisé la grâce de l’Évangile ; ils ont toujours eu dans leur cœur une saine inquiétude pour le Seigneur, un désir poignant de l’apporter aux autres, comme l’ont fait Marie et Joseph au temple. Nous aussi, nous sommes appelés aujourd’hui à accomplir des choix prophétiques et courageux » [42]
  4. Animés par l’esprit des Exercices Spirituels, tous, dans toutes nos écoles jésuites, nous devons faire nôtre un sens du merveilleux et un sens de l’espérance, appréciant grandement la tradition, discernant les besoins du monde, et désirant faire l’expérience de nouvelles manières de procéder, en vue d’atteindre nos objectifs traditionnels, à savoir : une plus grande gloire de Dieu et le salut des âmes. [43]
  5. Dans ce qui précède, nous avons réexaminé quelques-uns de nos documents fondamentaux et nous avons réfléchi sur la réalité actuelle de notre monde. En nous appuyant sur cet exercice, nous proposons maintenant dans cette troisième partie les marqueurs d’identité communs aux écoles jésuites à travers le monde.
  6. Nous considérons ces marqueurs d’identité comme des engagements que chaque école jésuite peut faire. Tout en s’appuyant sur Les caractéristiques de l’éducation jésuite et sur les Préférences Apostoliques Universelles, ils répondent à la réalité actuelle de notre monde.